Aujourd’hui, Jacqueline Auger vit en communauté avec trois autres soeurs sur Paris. Jusqu’en 1997, elle a exercé une activité professionnelle d’abord comme professeur de mathématiques puis en tant qu’ingénieur d’industrie à Thomson : cette expérience de vie d’entreprise l’a profondément marquée. Elle garde des relations avec ses anciens collègues. Elle nous parle de sa vie de sœur de La Retraite à travers quelques évènements de son existence et à travers des convictions qui l’habitent.
Ces dernières années, quels évènements ont marqué ta vie ?
La découverte du CISED (Centre d'initiatives et de services des étudiants de Saint-Denis) fut une belle expérience. Au début, j’y suis allée par obéissance plus que par envie. Là, progressivement, les relations se sont établies avec des étudiants étrangers. Paris VIII comptait près de 80% de personnes étrangères : des Comoriens, des Algériens… Le travail d’équipe a favorisé la formation d’une véritable communauté de collègues. De belles relations sont nées. Aider des étudiants avait aussi un côté gratifiant. Un véritable échange avec ces étudiants s’est tissé : je les aidais et ils m’aidaient aussi. Un jour, lors d’un atelier informatique, un étudiant m’appelle alors que j’aidais un autre. Je viens donc vers lui en pensant tout de suite à répondre à sa question informatique. Mais pourtant ses derniers mots sont « comment tu t’appelles ? ». Cette simple question disait beaucoup sur la relation qu’il souhaitait établir. Cela m’a invitée à être attentive à ne pas répondre d’abord au niveau technique mais bien au niveau humain…
L’expérience professionnelle, en entreprise, a aussi beaucoup marqué mon chemin (témoignages). Quand les gens apprennent mon métier d’ingénieur, il me demande si c’est avant ou pendant la vie religieuse. A priori, il penche plutôt pour avant. Pourtant la vie religieuse n’est étrangère à aucune vie. Depuis 1997, je suis à la retraite. Jusqu’à ces derniers temps, je me rendais sur le site de Thomson au moins une fois par mois pour rencontrer mes anciens collègues. Mais un autre évènement est survenu et je me suis arrêtée.
J’ai eu un grave accroc de santé avec la découverte d’un cancer du poumon. Quand on me l’a annoncé, j’ai été comme paralysée. A travers cet évènement, j’ai pourtant vécu une expérience importante. Il y a un avant et un après. La présence du Christ, déjà éprouvée au cœur de ma vie, s’est intensifiée par cette expérience : j’ai ressenti très fort que le Christ était avec moi à travers ma famille, ma communauté, la Congrégation : son amour passe par celui des autres ! Après mon opération, la fidélité des amitiés, de la fraternité m’a beaucoup touchée : pas un jour ne s’est passé sans visite. Maintenant, la fatigue se fait sentir et j’adapte mes activités, en fonction de mes nouvelles capacités.
Quelles sont tes activités ?
J’accompagne deux équipes de la Communauté vie chrétienne (CVX) ainsi qu’une autre du Mouvement des cadres chrétiens (MCC). Ce type d’accompagnement auprès d’équipes me met particulièrement à l’aise. En plus, les liens se tissent avec le temps. J’aide aussi pour les mathématiques des enfants voisins dans l’immeuble. Et puis, évidemment, je prends ma part de la vie communautaire.
Que vis-tu à travers la vie communautaire ?
Pour moi, la vie communautaire est le lieu pour aimer, le lieu de l’ouverture à la différence. Il est difficile de parler de l’amour de Dieu si on ne se coltine pas l’amour des autres. On sent les différences entre nous, même si on peut la vivre déjà au travail ou dans d’autres lieux. Là, c’est tout le temps. A travers les affrontements ou délicatesses au quotidien, la dimension fraternelle devient possible car nous vivons ensemble. Nous vivons là, dans une dynamique ; la vie communautaire est un stimulant constant à aimer…
Quel autre moyen t’aide dans la vie ?
L’habitude de la relecture m’aide à regarder mon quotidien avec le Christ. Cette relecture est fondamentale pour suivre le Christ, pour voir sa présence dans la réalité de la vie de tous les jours…pour demander pardon et envisager le lendemain…
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